Bonjour à tous,
Ravi de vous retrouver pour une nouvelle interview “Mouton Noir“, symbole d’AnotherCom. Le concept ? Je pose moi-même des questions à une personnalité du monde sportif (média, joueur, dirigeant, sponsor…). Après un premier “face à face“ avec Daniel RIOLO (After RMC), j’ai remis ça avec Gérard HOULLIER, un grand ami mais… ce n’est pas pour autant que je vais lui faire des cadeaux. J’attends avec plaisir vos commentaires et réactions.
Un mouton noir c’est chiant, ça a du talent, c’est difficile à gérer mais… on l’aime ! Quel est votre Top 5 des moutons noirs croisés durant votre carrière ?
Eric Cantona, Luis Fernandez, Paul Ince, Jean-Pierre Papin, Sylvain Wiltord. De très bons joueurs, des personnalités pas vraiment lisses mais sincèrement attachantes.
Vous êtes issus de l’enseignement, vous n’avez pas été footballeur pro. Etant donné votre cursus, vous considérez-vous comme un peu à part, comme un mouton noir ?
J’ai lu, dans des “biographies“ de joueurs, à propos de ma méthode d’entrainement : “C’est complètement différent“. Cette approche, je la tiens certainement de mon cursus. 25 ans en arrière à Noeux-les-Mines (D2), Lens, au PSG, je faisais des entrainements “globaux“, c’est à dire qui intègrent tous les aspects de la préparation (physique, technique, tactique) en même temps. C’était à base d’exercices ludiques en situations de matches et non de gammes. A l’époque, cela sortait de l’ordinaire. Je n’ai pas eu de préparateur physique avant Lyon.
Et d’où vous vient cette méthode ?
C’est surtout l’histoire d’une rencontre avec Guy Debeugny, un entraîneur et prof de gym dont j’ai été 2 ans l’adjoint à Noeux-les-Mines. Un chercheur qui avait 10 ans d’avance sur son temps. Pourquoi ? Il s’est dit : “Les amateurs ne peuvent pas travailler aussi longtemps que les pros. Il faut que je trouve des exercices hyper efficaces qui intègrent un peu tout“. C’est resté gravé. Depuis à l’entraînement, je fais en sorte que les exercices intègrent tous les paramètres, y compris les paramètres physiologiques. A Aston Villa (2010-2011), j’avais commencé un projet de jeu encore plus global. Ce qui soutient ma philosophie d’entraînement est le jeu, les joueurs, le plaisir, le progrès, les “2 J 2 P“.
Un entraineur doit-il systématiquement expliquer ses choix ?
Mon souci a toujours été d’expliquer tous mes choix, tactiques ou autres. Le propre d’un entraineur c’est avant tout de faire progresser son équipe. Comment s’y prendre ? Il y a ceux qui prônent le “Regarde comment je fais, fais comme moi“. Ce qui peut éventuellement marcher venant d’anciens pros. D’autres optent pour le “Fais comme je te dis et on ne discute pas“. Ce qui ne fonctionne plus du tout. Vis-à-vis de mes joueurs, j’étais très soucieux d’être en mesure d’expliquer le pourquoi de mes options et aussi de les convaincre. Personne n’avale un savoir et un savoir faire sans le comprendre et l’accepter.
Quelle est votre plus grande fierté d’entraîneur ? Votre plus grand regret ?
Gagner la Coupe d’Europe (UEFA) en 2001 avec Liverpool fut un moment extraordinaire. Mon plus grand regret reste France-Bulgarie en 1993. Une vraie blessure.
Dans l’Equipe Mag (juillet 2010 après Knysna), vous avez dit “Dans le bus, je pense que j’aurais trouvé les mots“. Sincèrement, qu’auriez-vous dit ?
Face à l’irrationnel, il faut s’efforcer de toucher l’émotionnel. Je pense que j’aurais trouvé les mots qui les touchent, eux, les joueurs. “Pense à tes parents, à tes enfants. Ils te regardent, toute la France te regarde, vous allez vous en vouloir toute votre vie“. Mais je n’y étais pas. Inutile de revenir sur la polémique.
Qui va remporter l’Euro 2012 ?
J’espère voir la France aller le plus loin possible. Pour moi le grand favori est l’Allemagne.
Comprenez-vous que les salaires des footballeurs peuvent choquer ?
A vrai dire, je suis davantage choqué par l’attitude de certains joueurs que par leur salaire. Les golfeurs, les pilotes de F1, les chanteurs… gagnent très bien leur vie mais il n’y a que dans le foot et surtout en France que cela dérange. Frank Sinatra a chanté à plus de 80 ans. Johnny Halliday donne encore des concerts. Les footballeurs ont une durée de vie très courte. En moyenne, ils gagnent de l’argent entre 23 et 30-31 ans. Ils produisent un spectacle et c’est devenu un vrai marché.
Alors pourquoi critique-t-on autant les footballeurs ? Il y a un vrai problème d’image. On ne forme pas les footballeurs à bien s’exprimer, communiquer alors que c’est le sport le plus médiatisé. C’est pour moi une faille du système…
Quelque part, oui. Il faut savoir faire son mea culpa même si nous avons amorcé un travail en ce sens au niveau des jeunes sélections nationales. Il est important de ne pas les laisser aller au casse-pipe dans les médias. Les erreurs de langages, les phrases toutes faites sont raillées, elles desservent le footballeur et le foot en général. Je parle de la communication et plus largement du comportement. On a d’autant moins d’indulgence avec un joueur s’il gagne 100 000 euros/mois. Maintenant, on se rend compte que gagner un match n’est plus suffisant. Il faut gagner avec la manière, avoir un bon comportement, une image.
En tant qu’ancien président du PSG, je n’ai jamais trouvé que le banc de l’OL, notamment à votre époque était un exemple de tempérance, de calme et de bonne éducation!! Qu’avez-vous à répondre à cela ?
(Rires) C’est vrai qu’à mon époque, le staff pouvait parfois être borderline.
Au fait, pourquoi n’êtes-vous jamais revenu au PSG ?
J’ai eu trois fois l’occasion de revenir. En 1998, Charles Biétry me contacte mais pas pour être entraineur. Pareil en 2005, Francis Graille pense à moi mais pas comme entraineur… Or moi, je voulais être sur le terrain ! La seule personne qui m’a concrètement proposé le poste, c’est Sébastien Bazin en 2009 pour succéder à Paul Le Guen. J’étais déjà sur mon projet avec la DTN mais j’avoue que cela reste un vrai regret de ne pas être revenu.
Qu’est-ce que Carlo Ancelotti, que vous connaissez bien, peut apporter au PSG ?
De la confiance et de la sérénité. En dehors de l’aspect tactique, de son palmarès, c’est quelqu’un qui fait face aux problèmes sans s’énerver. A ce titre, il amène une qualité que n’avait pas forcément Antoine, plus impulsif. Paris est un club pétillant, toujours sujet à crises… C’est bien d’avoir quelqu’un comme Carlo qui pourra tempérer tout ça.
Vous avez été entraîneur du PSG (1985-1988, champion de France en 1986). Que pensez-vous du récent débat autour du Parc des Princes/Stade de France ?
Pour moi le PSG doit jouer au Parc et nulle part ailleurs. Sans hésitation. Le Parc des Princes fait partie des racines du PSG, de son passé, c’est l’image du club.
Moi qui vous connais, je vous ai toujours accusé d’être un monomaniaque du foot. Avez-vous d’autres centres d’intérêt ?
(Sourires) Facile de dire qu’on a plein d’autres centres d’intérêt… Mais quand on est dans le foot de haut niveau, on ne pense plus qu’à ça, c’est très vampirisant. Ce qui, je le reconnais, est dur à supporter pour l’entourage. L’entraîneur (ou le président) ne rendent pas forcément les gens autour d’eux heureux. Quand en 2001, Arsène Wenger est venu me voir sur mon lit d’hôpital, il a expliqué à mes proches que tu ne peux réussir dans ce métier si tu n’es pas à 300 %. Quand on est entraineur professionnel, on devient complètement “monoculturé“, complètement ! Tu ne penses plus qu’à ça. Quand tu es responsable d’un club, tu as 10-15 décisions à prendre chaque jour, c’est impossible de décrocher, de dire : “Je laisse mes soucis sur le pas de ma porte“. Impossible. Entraîneur c’est 80% d’emmerdes et 20% d’émotions exceptionnelles.
Vous reverra-t-on sur un terrain de foot ?
En foot, il y a 2 choses qu’on ne peut pas prononcer, c’est “jamais“ et “toujours“. Mais je dois désormais penser à ma santé d’abord. Entraîneur reste un métier passionnant mais extrêmement éprouvant. Il m’arrive d’être sur un terrain pour jouer avec l’Equipe de France de la Pub à Issy-les-Moulineaux.
Avoir Alain Cayzac comme capitaine et sélectionneur de cette équipe, n’est-ce pas trop dur ? Comment le jugez-vous comment entraineur ?
Atypique pour le moins ! Je dirais un habile mélange de Ancelotti et Kombouaré, à la fois serein et sanguin…
Vous êtes nommé président d’un club du top 10 européen, qui prenez-vous comme entraineur ?
1- Arsène Wenger, 2- José Mourinho (pour le connaître, il est complètement différent de l’image qu’il a) 3-Rudi Garcia. Je pense que je pourrais bien m’entendre avec ces trois-là.
Dans la vraie vie, qui est vraiment José Mourinho ? Est-il vraiment “The Special One“ que l’on décrit ?
(Sourires) Il est inattendu et différent. C’est un type intelligent, sociable, affable… Malgré ce qu’on peut lire ici ou là, je peux vous dire que tous ses joueurs l’adorent. En attirant les médias de manière négative sur lui, il sait que cela protège son groupe. Et puis bon, son bilan parle pour lui. Il a gagné le championnat au Portugal, en Angleterre, en Italie, bientôt en Espagne. Je ne serais pas étonné qu’il débarque en France. Il a gagné la Coupe UEFA avec Porto, la C1 avec Porto, avec l’Inter Milan. Ottmar Hitzfeld a gagné la C1 avec 2 clubs différents, en Allemagne. Mourinho, lui, l’a gagnée dans 2 clubs différents mais en plus dans 2 pays différents. Incroyable.
Recueilli par Alain Cayzac
Vu par Gérard Houllier
Parmi les joueurs que vous avez coachés
Le plus grand. En France, Safet Susic (PSG). A l’étranger, Steven Gerrard (Liverpool)
Votre 11-type. Joël Bats (PSG) ; Jamie Carragher (Liverpool), Samy Hyypiä (Liverpool), Cris (Lyon), John Riise (Liverpool) ; Jérémy Toulalan (Lyon) ; Steven Gerrard (Liverpool), Safet Susic (PSG), Juninho (Lyon) ; Michael Owen (Liverpool), Karim Benzema (Lyon)
Le meilleur journaliste foot. Patrick Urbini pour sa connaissance du foot, sa compétence et les questions qu’ii posait, toujours très pertinentes.
Le meilleur consultant foot. Raynald Denoueix
Votre club de coeur. Liverpool. Je supportais ce club quand j’étais plus jeune, j’allais les voir jouer. Le fait d’en devenir l’entraîneur, de bâtir quelque chose dans ce club fut pour moi quelque chose de magnifique. Aujourd’hui, je regarde d’abord les résultats de Liverpool, PSG, Lyon et Lens.
Votre pronostic pour le podium de la L1. Le PSG champion avec quelques points d’avance. Ensuite, Montpellier et Lille mais je ne saurais dire dans quel ordre.
Un coach avec qui partir en vacances. Arsène Wenger qui est un vrai ami.
Un joueur avec qui partir en vacances. Gary McAlister, Michael Owen, Juninho.
CAYZACO. Chaque mois, retrouvez la chronique d’Alain Cayzac sur le Blog d’AnotherCom et réagissez ! Alain Cayzac décrypte la com’ dans le sport à partir de son expérience et de ses convictions. La chronique est interactive, ouverte au débat et à la discussion.
Alain Cayzac est né en 1941 à Evreux. Diplômé d’HEC, il travaille chez Procter & Gamble de 1965 à 1969 puis chez NCK, une agence de pub américaine, avant de co-fonder l’agence de pub Roux Séguéla Cayzac et Goudard. RSCG étant repris par Havas en 1991, il devient vice-président de Havas jusqu’en 2005. Il est Président du Paris Saint-Germain de juin 2006 à avril 2008.
Le 8 avril 2009, il est fait Chevalier de l’Ordre et de la Légion d’Honneur par le Président de la République, Nicolas Sarkozy.
bien vrai ce que vous dites sur le métier d’entraîneur. a lafois passionnant et exclusif. Peut-être est-ce le lot de ceux qui exercent un métier-passion, merci les moutons noirs pablo
bonjour Mr Houllier
bon choix pour Mr R denoueix je suis fan de ses analyses comme consultant. mais pourquoi il ne commente pas cette saison ? Est-il toujours sur Canal ???j’espère qu’il n’a pas signé à al jazira lol
c’est vraiment Cayzac qui fait l’interview de garard Houllier ? si oui, j’avoue que le concept est pas mal ca change des question bato ou agressives de certains journaleux
– concernant la question sur le PSG quel poste exactement vous proposait Charles Biétry puis Francis Graille ? conseiller du président comme bernard lacombe à Lyon?
merci pour la réponse!!
au sujet d’Eric cantona http://www.purepeople.com/article/eric-cantona-les-insultes-du-king-apres-une-representation-tres-speciale_a97090/1
bonsoir,
vu votre chronique sur RMC. Dans votre catégorisation le meilleur mouton noir des journalistes pour moi (simple supporter de foot) c’est DIDIER ROUSTAN j’adore. Un passionné qui ne se prend pas au sérieux.
a bientôt messieurs
pour ou contre les 75% de François Hollande ?
bonsoir euh c’est moi ou Carlo Ancelotti a grossi depuis cette photo en Angleterre ?
allez paris !
Messieurs, je trouve l’interview a la fois chaleureuse et bien intéressante
si je peux me permettre, j’aurais aimé en savoir davantage sur l’épisode Ksysna, pourquoi n’étiez-vous pas sur place le jour de la mutinerie car Knysna était bien le camp de base des Bleus, je pensais que toute la délégation française y était réunie. Mais comme vous le dites aussi désormais mieux vaut regarder devant et ne pas remuer le couteau dans la plaie.
il n’empêche, je vous trouvais un peu dur mais à la lecture de cet entretien je revois mon jugement en mieux bonne journée Antoine R.
en même l’on vous imagine mal partir en vacances avec david ginola
bjr
pas mal ces petites itw °-° / en tant qu’ancien DTN quelle est votre position par rapport au foot féminin ?
Ps allez les bleues
1993 reste probablement votre pire souvenir d’entraîneur. Un drôle de souvenir pour moi aussi j’étais au Parc Simple spectateur et supporteur de l’équipe de France, je n’étais pas dans l’intimité du vestiaire ou sur le terrain. Cette élimintation prématurée est-elle la faute d’un seul homme, 1 équipe c’est 11 joueurs sur le terrain, c’est un staff c’est un collectif. C’est peut etre bateau ce que je dis mais un entraîneur ne doit-il pas protéger coute que coute son équipe, ses joueurs ?
vous êtes l’un des plus gros palmarès du foot français mais peut-être sur ce coup-là avez-vous fait une erreur, au moins dans la communication ? faute avouée, a moitié pardonnée
bonne continuation et au plaisir de vous lire,
franck
yo
je veux bien partir en vacances avec vous ! mcalister, juninho, owen, wenger ca peut être pas mal pour les foot sur la plages
paris champion le reste c’est du bidon ?
bonjour alain cayzac,
depuis le lancement de votre chronique, j’ai lu tous vos Cayzaco sans exception et je veux vous dire que j’apprécie beaucoup cette approche que vous avez. J’aime aussi vous lire dans vos interviews mouton noir, un symbole qui me parle et que je trouve très intéressant.
pour réagir sur votre entretien avec Gérard Houllier, l’évocation de la « méthode globale » m’a intéressé d’autant plus que je suis moi meme issu l’enseignement (retraité). à la vue de son équipe type, respect à Mr Houllier qui a eu la chance d’entrâiner de grands joueurs et de gagner avec eux (Liverpool, Lyon).
Une vie d’entraîneur est faite de hauts et de bas et je veux bien croire que Ksyna, France-Bulgarie ont été durs à vivre, pour vous comme pour nous. la vie est ainsi faite mais ça reste « que » du foot. faut-il en arriver à un procès comme récemment ? je trouve cela dommage et démesuré mais je ne me permettrais pas de juger.
bravo pour votre carrière et allez le Rc Lens
A quand un interview avec un sportif autre que footballeur?? Pourquoi pas en tennis votre autre sport de prédilection
Gaël monfils ça pourrait être sympa
Bonsoir mr CAYZAC, j’avais déjà lu cette chronique et comme d’hab j’ai bien aimé : )
mais l’objet de mon commentaire aujourd’hui est de connaître votre avis sur le PSG actuellement. J’avour être de plus en plus dépité et je sens que ce titre qui nous tendait les bras va finir par nous échapper.
etesvous du même avis que moi? cordialement
ps. bon match ou bon coaching ce soir avec l’équipe de france de la pub comme précisé plus haut : ))
alain et/ou gérard, que pensez-vous de la dissolution récente de Liberté pour les Abonnés? bon chose ou pas ? vous remerciant d’avance pour la réponse,
un amoureux anonyme du psg